La tombe de mon grand-père
J'avais pour habitude, quand je me levais pour la prière de l'aube, de regarder par le balcon le monde naturel dans le quartier, portant encore mes habits de prière, pour lire in petto quelques versets du Coran, ou assise sur une chaise près de l'ouverture, pour humer l'air du jour.
En me délectant des brises parfumées et pures du petit matin, je renouvelais l'air dans mes poumons, pour me préparer à un jour nouveau.
Je ne saurais dire ce qui, par une étrange affection, me liait à ce cimetière que surplombait ma fenêtre, quand je n'aurais dû, au fond, ne lui trouver que la désolation et la peur portés par une odeur de mort qui s'approche.
Chaque fois que je me sentais une lassitude envers mes dévotions quotidiennes, je me forçais corps et âme à me rendre sur ce lieu, avec l'effroi d'un pieu adorateur en rituel.
Mais je ne m'y résolvais que rarement, bien que souvent, j'y fusse surprise par d'improbables incidents! Etait-ce un pur hasard ou bien une impulsion divine?
Ce jour-là, je fus interpellée par ce jeun homme qui, les larmes aux yeux, errait dans les recoins du cimetière à la recherche de la tombe de son père.
Je passais par-là, récitant l'Ouverture(1) à tous les morts eut-elle pu être pour eux un souffle d'apaisement, quand il m'interrogea, après avoir désespéré trouver le gardien des lieux. Je lui dis alors :
- Elle est là, mon enfant...Et il y aurait entre nous un lien de parenté à en juger par le nom de famille? Ne t'inquiète pas car ce qui se perd sur Terre et récupéré par le Ciel. Ne désespère donc pas...
Il me fixa bizarrement, puis s'en alla sans daigner m'adresser le moindre mot de rapprochement... bien qu'il me remercia.
Nombre d'enfants, avais-je ouï dire, s'étaient perdus en ces lieux, prenaient le tombes pour abri. Mais le gardien finissait toujours par trouver rapidement une solution, lui qui connaissait les gens du voisinage de manière individuelle. Aussi, il s'informait sur toute personne étrangère au quartier... faisait des recherches.
Je descendis les escaliers de l'immeuble ce jour-là partant pour certaines de mes courses, et prendre un taxi que j'avais rapidement trouvé grâce à Dieu. Malheureusement le conducteur était d'une humeur nerveuse :
- Regardez ce jeune homme et cette fille, ils n'ont plus aucune pudeur, et n'on trouvé nulle part ailleurs que ce cimetière pour s'assoir! N'ont-ils point entendu les hurlements des morts à ce moment? Et puis, réflexion faite, la petite est voilée... tout comme vous...
- Je vous demande pardon mon bon frère! Elle porte en effet le voile mais ça ne fait pas d'elle une femme voilée pour autant! Ne généralisons pas s'il vous plait... Le humains ne sont pas tous du même acabit...
-Peut-être que si vous aviez été bonne éducatrice, vous l'auriez orientée, et nous auriez épargné ces spectacles horribles et répugnants...
- D'accord...
Quand je m'approchais, ils avaient disparus. Mais je parvins à l'apercevoir lui, en pleine dispute avec le gardien du cimetière... alors qu'une foule se formait autour de lui... A ce moment je descendis du véhicule, j'entrais dans le cimetière... et j'allais visiter la tombe de mon grand-père.
C'est alors que l'impossible arriva... Je passais devant les voix qui s'élevaient... tout en les ignorant.
Il m'aperçut... puis me chuchota dans l'oreille :
- Ne sommes-nous pas parents?
Rima Al-Khani 19/12/2012